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mardi 23 janvier 2007

Dinant sous le choc. Fournaux (s') "explique"

L'acte commis ce 22 janvier par un élève de 16 ans à l'institut Cousot de Dinant fut particulièrement horrible et violent.
Pour rappel, un étudiant (d'origine serbe) renvoyé de l'établissement avait souhaité rencontré le directeur de l'école et ce jeune homme avait porté à plusieurs reprises des coups de couteau au directeur, qui est resté longtemps entre la vie et la mort avant que l'on apprenne que son état de santé n'était plus "critique".

Peu après, l' équipe de la RTBF dépéchée sur place receuillait les impressions du député-bourgmestre dinantais Richard Fournaux (MR).
L'homme fort de la cité mosane y allait d'un commentaire particulièrement "osé": selon lui, l'acte commis par le jeune homme est à expliquer par ses origines ("ethniques") et les comportements qui y sont liés: sens de l'honneur, réactions impulsives et violentes (etc).

Est-ce là un indice de l'affirmation de plus en plus marquée de Fournaux très à droite de l'échiquier politique, alors que certains lui prêtent des sympathies pour le désormais célèbre Père Samuel, prêtre intégriste anti-musulman ("une mosquée, c'est plus dangereux qu'une centrale nucléaire") carolorégien?

Tout à fait interloqué par une réaction aussi simpliste de la part d'un homme politique aussi expérimenté que M.Fournaux, votre serviteur a pris l'initiative de rédiger un courriel à l'attention du député-bourgmestre.
En voici les principaux extraits:

Monsieur le député-Bourgmestre,

Par la présente, je tiens à vous indiquer mon énorme étonnement et indignation suite à vos propos tenus au journal télévisé de la RTBF suite au tragique événement survenu à l'institut Cousot. (...)
A propos de cette réaction telle qu'elle a été présentée à l'antenne - je ne suis pas sans savoir que vos paroles ont pu être "dé-contextualisées" au montage-, je dirais principallement deux choses.

Premièrement, nous avons affaire là à des propos pour le moins simplistes, qui plus est de la part d'un homme politique de votre expérience, par rapport à des causes qui sont assurément bien plus complexes que de simples origines ethniques.

Deuxièmement, ces paroles sont aussi simplistes dans le sens qu'elle tendent à attribuer tels caractéristiques ou comportements - particulièrement odieux dans ce cas ci, en plus- aux membres d'une certaine communauté "ethnique" présente sur notre territoire.
Vous le savez aussi bien que moi probablement, de telles généralisations sont le "terreau" d'attitudes de type "racistes" qui empoisonnent la vie de nos concitoyens qui y sont confrontés. C'est en celà que j'estime que vos paroles sont aussi dangereuses.

Dans le contexte actuel d'une augmentation de l'influence des thèses d'extrème-droite auprès des couches les plus fragilisées de notre société, je vous avouerais que je trouve totalement inquiétant d'entendre un éminent membre d'une formation politique démocratique propager de telles idées simplistes, fut-ce sur un ton interrogatif.

Aussi, d'un point de vue plus local, pour avoir fréquenté assiduement votre belle Ville pendant mes trois années passées à l'internat du Collège Notre-Dame de Bellevue (2000-2003), j'ai constaté moi-même la présence particulièrement importante à Dinant de jeunes gens animés (ou influencés) par des idées d'extrème-droite ("skinheads").
Il s'agit de groupuscules de jeunes hommes (voire femmes) en manque de "sensations" et sensibles à de telles idées simplistes selon lesquelles telle personne de telle origine aurait tel comportement contraire à l'"ordre" de la société.

Il me semble que le citoyen est en droit d'attendre de ses responsables politiques issus de formations politiques démocratiques que ceux évacuent ces idées simplistes en pronant le dialogue ou l'ouverture d'esprit dans le cadre de la sauvegarde de la société démocratique et multiculturelle. (...)
Tant que ces idées restent dans le cadre d'intimidations verbales et physiques à destination des personnes concernées, cela est peut être peu nuisible à la société (pas à l'individu!) mais je ne serais malheureusement pas étonné que l'accumulation de telles idées soient à terme la raison d'un autre acte de violence d'une nature peut être similaire à l'acte commis sur la personne du directeur de l'institut Cousot.

Ceci dit, l'on peut penser d'après moi que ces propos ont été tenus "sous le coup de l'émotion", surtout que je ne sais pas quel lien vous entreteniez avec le directeur de l'école.
Néanmoins, il me semble que l'on peut attendre également des représentants du peuple, lorsqu'ils s'expriment en tant que tels, qu'ils le fassent avec modération (au niveau de la forme et du fond) et clairevoyance. A mon sens, c'est cette double attente que vous n'avez pas (totalement) remplie dans le cadre de votre intervention télévisée.

Enfin, plus généralement, quand bien même vous ayez été particulièrement "choqué" -quoi de plus normal!- par l'acte commis par le jeune homme, c'est dans ces moments-là que l'on mesure le degré de dignité, d'humanité et de tolérance des intervenants. A ce propos, aviez-vous entendu une fois les parents de Joe Van Holsbeek exprimer aux médias une quelconque opinion selon laquelle l'acte commis par les deux jeunes gens à la Gare Centrale était peut être à expliquer par leurs origines polonaises? Même s'ils le pensaient -ce qui était déjà une erreur,-, ils se sont bien gardés de le dire publiquement, pour ne pas inciter à n'importe quelle forme de haine raciale.
En somme, dans le contexte d'une Ville de Dinant touchées -plus qu'ailleurs peut être- par les idées simplistes véhiculées par les sympathisants d'extrème-droite, j'ai estimé vos propos simplistes et dangereux, et je vous demande, s'il vous plaît, une explication, éventuellement accompagnée d'excuses à l'encontre des membres de la communauté serbe de Belgique.

Dans l'attente d'une réponse de votre part, je vous prie d'agréer, Monsieur le député-Bourgmestre, l'expression de mes sentiments respectueux.

François HAENECOUR (étudiant en droit à l'UCL-21 ans)

La réponse n'a pas tardé à me parvenir.
Dans cette réaction, Richard Fournaux confirme ses propos tout en reconnaissant implicitement se situer dans le "politiquement incorrect".
Autant dire que ses pseudo explications (il n'y fait que confirmer ses paroles tout en argumentant quelque peu celles-ci) ne me "conviennent" pas du tout.

1) Selon ses dires, M.Fournaux voulait indiquer qu'il existe une "tradition de violence dans certaines communautés" (dont la communauté serbe) et il veut nous faire croire que ce sentiment à l'égard de cette communauté (ou assimilés) est ou devrait être partagé par tout un chacun.
C'est précisement ce message que je trouve particulièrement simpliste (croire que certaines communauté sont plus violentes que d'autres par tradition ET que cela explique le geste de l'étudiant dinantais) et dangereux (diffuser une telle image d'une communauté qui éprouve sans doute déjà beaucoup de mal à se défaire à des caricatures et autres que l'on lui "colle") dans le sens où cela pourrait inciter à quelque chose comme le rejet ou même la haine raciale.

A celà, je préfère de loin les explications du reportage de la RTBF diffusé ce 23 janvier et qui insistait sur le fait que ces jeunes gens qui ont connu la guerre gardent de lourdes séquelles d'ordre psychologique qui peuvent les amener à sacraliser les valeurs d'honneur, de violence (...)

En somme, en plus de s'être montré tout à fait irresponsable, j'estime parfaitement inappoprié de la part de M.Fournaux d'avoir véhiculé de telles idées après ce grave incident survenu dans un établissement scolaire qui, d'après ce que nous avons pu constater dans les medias et de ce que je connais personnellement de cet institut, semble mettre un point d'honneur à contrer le racisme et à promotionner une société ouverte et tolérante...

2) Quant à son argumentation selon laquelle ce serait au jeune homme et à sa famille (ils tentent de décrocher un titre de séjour) à s'adapter à notre culture et non l'inverse, je suis particulièrement partagé puisque, en dehors du fait que je me demande ce qu'il veut dire par "notre culture" (conception uniculturelle de la Nation, culture démocratique?), je pense qu'il est aussi du devoir de la Belgique et de ses représentants de ne pas propager ce genre d'idées simplistes et dangereuses selon lesquelles certaines communautés seraient traditionnellement habitées d'un sentiment de violence incompatible avec notre culture.
Il s'agit ici du respect dû, dans un Etat de droit, à chaque personne vivant sur le territoire (avec ou sans "papier") de ne pas être offenser par de tels propos ou les conséquences facheuses (rejet, discriminations..) de ceux-ci.
Cela rejoint aussi l'idée selon laquelle l'intégration des personnes d'origine étrangère dans notre société est quelque chose de réciproque, dans le sens où ce n'est pas
uniquement à l'allochtone à s'adapter à l'autochtone (idée soutenue par Fournaux) mais que c'est un processus plus complexe -mais autrement plus enrichissant et "productif"- d'échanges et de concessions mutuelles.

Bref, fort peu heureux de la réponse de Richard Fournaux, j'ai déjà commencé à contacter des organisations de lutte contre le racisme (...) pour donner une éventuelle suite à cette affaire, par exemple sous la forme d'une rencontre (avec interview?) entre jeunes issus de l'immigration serbe et le député-bourgmestre de Dinant.


Enfin, dans les semaines à venir, nous tenterons d'ouvrir un débat sur ce blog sur la récurante question de savoir où placer les limites entre le droit à la liberté d'expression et la lutte contre le racisme.

Vous trouverez ici-bas l'intégrale de la réponse de M.Fournaux:

Cher Monsieur Haenecour,

J’ai bien reçu votre mail de ce mardi 23 janvier 2007.

Je ne suis en aucune manière sympathisant des thèses de l’extrême droite. Je suis de ceux qui commencent réellement en avoir ras le bol du politiquement correct dans notre pays qui interdit de dire certaines choses.

Mon interview diffusée, même si malheureusement elle était un peu courte par rapport à ce qui a été déclaré, voulait seulement affirmer que d’un point de vue culturel il est évident qu’il y a une tradition de violence dans certaines communautés, notamment issues des pays provenant de l’Ex-Yougoslavie ou encore de plusieurs pays de l’Est. Ce n’est un secret pour personne et l’affirmer n’est en aucune manière criminelle.

Les déclarations du jeune homme, dont vous avez sans doute depuis entendu parler, vont totalement dans ce sens, puisqu’il n’hésite pas à déclarer que son honneur a été bafoué par le Directeur de l’école et que dans son pays l’on accepte pas ce genre de choses …

Tout cela laisse rêveur et autant il faut être prudent dans nos déclarations, autant il faut être tolérant, veiller au respect des grands équilibres démocratiques, etc …, autant l’on ne peut pas non plus toujours rester sans réaction ni sans oser dire certaines choses.

Ce jeune homme et sa famille sont candidats à l’accès sur le territoire. Il ne faut pas renverser les rôles. C’est quant même eux qui doivent s’adapter à notre culture et non nous qui devons accepter l’importation dans notre pays d’une manière d’agir bien peu démocratique et que l’on peut même qualifier tout simplement, dans ce cas-ci, de criminelle.

Je vous prie de croire, cher Monsieur Haenecour, en ma sincère considération et en mon entier dévouement

Richard FOURNAUX

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mercredi 10 janvier 2007

Retour sur la "fin de la Belgique"...

... avec, dans La Libre d'aujourd'hui, cette excellente carte blanche d'Hughes Dumont, professeur de droit constitutionnel aux Facultés universitaires Saint-Louis (Bruxelles), dont le nom avait été évoqué à plusieurs reprises au lendemain de la farce ertébéenne, comme ayant collaboré à celle-ci... Il s'en explique et nous livre également quelques considérations apéritives au prochain "round institutionnel". En suggérant notamment aux politiques francophones qu'ils exigent de leurs partenaires flamands qu'ils adoptent une résolution affirmant leur attachement à un état commun et durable. Histoire de mettre fin au "chantage au chaos".

Le texte complet ici

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mercredi 3 janvier 2007

Trêve des blogueurs

MIAM MIAM MIAM !Faute de mieux, me voilà contraint de tomber dans un lieu commun (la fameuse "trêve des confiseurs") qui trône sans doute au palmarès des expressions journalistiques les plus éculées (aux côtés d'une autre métaphore pâtissière, cette fameuse "cerise sur le gâteau" qu'on nous sert à tous les plats). Mais cessons de nous étendre sur sur la pauvreté lexicale de nos amis journaleux; cela risquerait d'attirer l'attention sur la mienne puisque, malgré mes sarcasmes, je ne parviens pas à échapper à leurs travers.


Le véritable objet de ce message est donc l'annonce d'une période de calme plat sur ce blog. Vous aurez sans doute déjà remarqué le ton beaucoup plus léger des derniers posts. Cette tendance atteignant à présent son paroxysme. Car en cette période studieuse pour les étudiants que nous sommes, Francky et moi n'auront pas vraiment l'occasion d'écrire. Ce sera donc, exceptionnellement, "notre blog ensuite".

La reprise des hostilités est prévue pour le début du mois de février avec, notamment, un dossier sur les prochaines élections législatives. Nous espérons lancer la discussion sur cette échéance électorale majeure qui, paradoxalement, semble passionner nettement moins le public belge que les présidentielles françaises...

Rendez-vous dans un mois.

Eigen blog eerst !

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